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Esquif (à fleur d’eau)

Anaïs Allais Benbouali

Chaque année, ce sont des milliers de personnes qui tentent la traversée de la Méditerranée au péril de leur vie. Ce conte pour petit·es et grand·es nous embarque sur l’Ocean Viking affrété par SOS MEDITERRANEE et aborde ce sujet avec poésie sans gommer sa complexité.

Lieu
  • Châteauvallon
  • Studios du Baou
Accessibilité
  • En famille
    • dès 8 ans
    • Représentation inclusive le Mer. 3 juin à 10h
  • Dates Durée 45min
  • mardi 2 juin 2026 19:00
  • mercredi 3 juin 2026 10:00
  • mercredi 3 juin 2026 14:30
Tarifs
  • Plein tarif 30 €
  • Tarif adulte avec la carte Châteauvallon-Liberté 20 €
  • Tarif partenaire (CSE et Associations culturelles partenaires) 20 €
  • Tarif - 30 ans 15 €
  • Tarif - 18 ans 10 €
  • Tarif solidaire 5 €
  • Tarif solidaire famille adulte 10 €
  • Tarif solidaire famille enfant 5 €

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Informations pratiques

Anaïs Allais Benbouali s’est plongée dans la lecture et l’écoute de nombreux témoignages de rescapé·es secouru·es par l’équipe de SOS Méditerranée à bord de l’Ocean Viking, leur navire ambulance. Touchée par les récits de rescapé·es, elle a cherché les mots justes pour les transmettre aux enfants. Sur scène, elle convoque deux personnages. Il y a d’abord la mer qui prend corps. Elle s’adresse à nous, s’indigne de l’indifférence des humains et gronde parfois. Au loin, l’Ocean Viking secourt celles et ceux qui n’ont eu d’autre choix que de monter à bord d’esquifs, des bateaux de fortune.

Deux actrices, un violoncelle et un décor minimaliste suffisent à faire surgir cette vérité, pendant que des voix, que nous écoutons les yeux fermés, révèlent avec pudeur des histoires d’exil.

Texte et mise en scène Anaïs Allais Benbouali
Interprétation Amandine Dolé (comédienne et violoncelliste) et Julia Gòmez Valcàrcel (comédienne)
Scénographie Lise Abbadie
Écriture sonore Anaïs Allais Benbouali et Sandy Ralambondrainy
Réalisation sonore et régie son Sandy Ralambondrainy
Régie générale et régie lumière Daniel Ferreira
Remerciements Falmares, Ismatou, Samar, Philomène, Sara, Fariba, Abid, Louna, Nour, Swann, Julien, Nahed et Moussa

Production Théâtre de Sartrouville — CDN spectacle créé dans le cadre du festival Odyssées en Yvelines 2024
Coproduction La Grange aux Belles

Photos © Tuong-Vi Nguyen
Texte © Vanessa Asse

C’est depuis mes quelques années passées à Bussang, dans les Vosges, que je rêvais d’écrire un drame rural. La campagne est peu présente dans le théâtre contemporain, quasi absente, à l’image sans doute de ce qu’elle pèse socialement aujourd’hui en Europe.

Côté théâtre, j’ai été marqué, enfant, par Le Grand valet de Pierre-Jakez Hélias, au Théâtre de la Parcheminerie, à Rennes, par la troupe de la Comédie de l’Ouest – et par son grand repas silencieux. Plus tard, par Désir sous les ormes de O’Neill, au Grand Huit (TNB), mis en scène par Mattias Langhoff – et son cheval de labour.

Je me souviens des fermes du pays Gallo de ma mère où, nous, urbains, mais dotés d’un jardin, allions acheter du grain pour nos poules ; de l’immense table, du banc en bois, de la grande cheminée et des chats nourris exclusivement de souris. J’ignorais que derrière cette image d’Épinal (qui n’avait rien de ragoûtant pour un enfant – ça sentait fort et on comprenait mal le patois de ces messieurs qui prisaient le tabac et de ces dames toutes sèches qui servaient le petit rouge sur la toile cirée) était déjà en marche une agriculture productiviste qui poussait à coup d’engins rutilants et de produits magiques – et je suppose que nos poules béquetaient de l’insecticide à gogo, et nous par la même occasion, lorsque nous gobions nos mouillettes.

Cher·es vous qui allez assister à une représentation d’Esquif, vous dire tout d’abord que je suis extrêmement heureuse de partager ce spectacle avec vous. Je tiens à vous dire en amont de ce moment pour que les spectateur.ices présent.e.s ce jour-là, petit.e.s et grand.e.s, soient préparé.e.s à la thématique du spectacle. Non pas qu’il soit spécialement « dur » dans sa forme ou les mots choisis, puisque je l’ai vraiment pensé pour des enfants de 8 à 99 ans, mais parce qu’il s’agit d’un sujet actuel et contemporain qui peut malheureusement toucher de près ou de loin des personnes présentes. J’ai échangé avec des membres de SOS Méditerranée tout au long de l’écriture de ce texte qui porte sur la situation en Méditerranée centrale et les missions de sauvetage menées par l’association. Ils m’ont mis en garde quant à la possibilité que des personnes ayant vécu la traversée, ou dont les parents ont vécu la traversée, soient remuées par le fait d’y être confrontées le temps d’une représentation, qui plus est si elles n’en ont pas été informées auparavant. C’est pour cela qu’il me semblait nécessaire de vous écrire, parce que les membres de SOS Méditerranée eux-mêmes, avant de faire des sensibilisations en établissements scolaires, s’assurent que chaque personne à qui cet échange est proposé soit consciente du sujet dont il sera question. En ce qui concerne le spectacle Esquif, il est donc également important de s’assurer du consentement de chaque spectateur potentiellement concerné à l’idée d’y être ramené par un biais artistique, malgré la légèreté et la douceur que j’ai essayé d’insuffler au spectacle.

Pour l’écriture de ce texte, je me suis plongée dans la lecture et l’écoute de nombreux témoignages de rescapé·es secouru·es par l’équipe de SOS Méditerranée à bord de l’Ocean Viking, leur navire ambulance. J’ai également regardé de nombreux documentaires sur les sauvetages qu’ils opèrent en mer, écouté des interviews de marins sauveteurs, de sages femmes, de médecins ou de journalistes présents à bord. Ma première réaction a été la sidération, comme quand on entend parfois ces chiffres insensés à la radio. Une sidération qui coupe la pensée tant ce qu’on peut lire ou voir à ce sujet est terrible, au-delà de l’entendement. … LA MER – Je ne vais pas y aller par quatre chemins : je suis très très très en colère contre certains humains adultes. Ils ne pensent jamais à me demander mon avis, ils me font passer pour un monstre avaleur de vies alors que ce n’est pas moi qui tue, ce sont les murs les frontières que certains adultes de votre espèce ont inventés. Extrait « « dossier de création Esquif (à fleur d’eau) 4 Quand il a fallu traduire cette matière pour qu’elle soit audible par des enfants (mais également par des adultes), j’ai dû trouver un angle pour tenter de dépasser cette sidération et inviter à la réflexion, pour entrevoir l’espoir qu’un jour tout cela soit derrière nous. Un angle pour sortir de ce sentiment d’impuissance, de cette culpabilité que peut engendrer la soudaineté et brutalité de la prise de conscience. Un angle pour donner l’énergie, à la mesure de chacune et de chacun, d’agir, de parler, de raconter, de témoigner. Pour cela, j’ai choisi la forme du conte et des personnages « non humains ». Pour déplacer notre perception de tout cela, pour regarder les choses de façon réflexive et dépasser le stade des émotions. C’est donc la mer Méditerranée qui s’incarnera devant vous pour témoigner des histoires qu’elle reçoit. Et elle a spécifiquement demandé de le faire devant des enfants, symboles d’espoir et de changement. Ce mot aussi puisque, dans la mesure du possible, des séances de sensibilisation scolaire avec des bénévoles de SOS Méditerranée seront proposées en aval du spectacle à vos classes. Ce temps, idéalement prévu peu après la représentation, permettra aux élèves de saisir concrètement les missions de cette association de sauvetage en mer, et de poser toute question née pendant le spectacle. Je vous remercie de considérer la démarche que j’ai à vous écrire comme une précaution, qui ne sera utile que dans des cas isolés. Mais même si cela ne concerne qu’un·e élève sur les centaines concerné·es lors de cette tournée, cela me semble nécessaire.

Je vous remercie encore pour l’attention que vous vous voudrez bien porter à cette demande, et pour les mots que vous choisirez afin de préparer vos élèves à ce moment, je l’espère, de partage et de communion autour d’un sujet nécessaire pour notre humanité.

Anaïs Allais Benbouali

Ce documentaire en forme de conte poétique s’adresse avec beaucoup de tact aux enfants à partir de huit ans. Il peut s’accompagner de sensibilisation scolaire faite par les bénévoles de S.O.S. Méditerranée. L’alerte est lancée : aux programmateurs et éducateurs de l’entendre. La metteuse en scène, comédienne et directrice artistique de la compagnie la Grange aux Belles est aussi l’autrice de nombreux textes comme Au milieu de l’hiver j’ai découvert en moi un invincible été et Par la mer (quitte à être noyées). Elle a réalisé avec Isabelle Mandin son premier documentaire, À regarder les poissons, autour de notre rapport à l’empathie. Restons attentifs à ses prochaines réalisations. Mireille DavidoviciLe Théâtre du Blog

Le cas d’Esquif est loin de constituer une première en matière de frictions dans les rapports au sein du festival entre l’artistique d’un côté et de l’autre les partenaires institutionnels, financiers ou encore éducatifs. Leur fréquence toutefois s’intensifie, du fait entre autres de l’urgence particulière que manifestent les artistes à partager avec le jeune public leurs regards inquiets sur le présent. Cette édition en a témoigné avec force, soulevant des sujets tels que l’exil, le racisme ou encore le consentement. Chacune à sa manière, les propositions du festival portent la revendication d’une totale liberté de création face aux possibles frilosités ou résistances qu’ont toujours plus à redouter artistes et équipe du théâtre dans un contexte social et politique tendu.
Anaïs Heluin, sceneweb.fr

Anaïs Allais Benbouali est autrice, metteure en scène, comédienne et directrice artistique de la compagnie la Grange aux Belles. Formée au Conservatoire de Nantes et à l’Institut des arts et diffusion (IAD) en Belgique, elle complète sa formation par des stages mais également par des résidences de recherche d’écriture à l’étranger (Québec, Cameroun, Algérie ). Elle signe Lubna Cadiot (x7) en 2012, Le Silence des Chauves-Souris en 2015, Au milieu de l’hiver j’ai découvert en moi un invincible été en 2018 (chez Actes-Sud Papiers) et Par la mer (Quitte à être noyées) en 2023 (aux Éditions Koïne). En 2016, elle écrit et interprète W., répondant à une commande de la compagnie de Wajdi Mouawad. Elle est également dramaturge et dispense des ateliers d’écriture et de mise en voix pour différents publics : élèves de conservatoire, collégiens, universitaires, amateurs, elle a été artiste  associée au Grand T à Nantes, à la Comédie de Caen et autrice invitée au Théâtre de la Colline. Elle a coréalisé avec Isabelle Mandin son premier documentaire, À regarder les poissons, autour de notre rapport à l’empathie.