Danse

Post-Panamax

Franck Micheletti

Préparer, stocker, expédier, distribuer. La circulation des marchandises gouverne le monde. En fin observateur des paysages urbains et de leurs mutations, Frank Micheletti chorégraphie ces flux incessants. Inspirée du popping, sa danse faite de micropulsions est à l’image de notre planète, en tension.

Lieu
  • Le Liberté
  • Salle Fanny Ardant
Accessibilité
    • Dès 12 ans
  • Dates Durée 1h
  • mercredi 1 octobre 2025 19:30
  • jeudi 2 octobre 2025 19:30
  • vendredi 3 octobre 2025 19:30
Tarifs
  • Plein tarif 30 €
  • Tarif adulte avec la carte Châteauvallon-Liberté 20 €
  • Tarif partenaire (CSE et Associations culturelles partenaires) 20 €
  • Tarif - 30 ans 15 €
  • Tarif - 18 ans 10 €
  • Tarif solidaire 5 €
  • Tarif solidaire famille adulte 10 €
  • Tarif solidaire famille enfant 5 €

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Informations pratiques

D’un port à un autre, travailleur·euses, machines et technologies assurent inlassablement une danse mécanique. Tracées et surveillées, les matières transitent dans de vastes circuits régis par l’économie mondiale.

Pour mettre en lumière cette réalité qui façonne nos vies, Frank Micheletti puise dans le popping. Sur scène, trois interprètes se révèlent être des virtuoses de cette danse urbaine, à la croisée du funk et du hip-hop. À coup de mouvements saccadés et de contractions musculaires rapides, toutes et tous fragmentent chacun de leurs gestes avec précision. Leurs corps jouent sur la dynamique, sur le rythme, traduisant ainsi la cadence épuisante des logiques marchandes.

Conception et chorégraphie Frank Micheletti
Danse Aline Lopes, Antuf Hassani et Amelie Olivier
Musique mixée en live par Yaguara
Voix Remy Bres-Feuillet
Création lumière Ivan Mathis
Création costumes Violette Angé
Création vidéo Caroline Bernard
Complicité scientifiques Mathieu Quet et Michel Lussault

Production Kubilai Khan Investigations
Coproduction Les Scènes du jura – Scène nationale / ACB Scène Nationale – Le Théâtre – Bar-le-Duc / Scène nationale de Bourg-en-Bresse / Usine à Gaz – Nyon / Château Rouge – Scène conventionnée – Annemasse / POLE-SUD CDCN Strasbourg / Am Stram Gram Genève
Soutiens Département du Var / Studio Accrorap / Marseille Objectif Danse

Photo de couverture © Demonios — Agnès Mellon
Photo diaporama © DR
Texte © Vanessa Asse

Comment ça voyage ?

Regardons de plus près la danse mécanique des marchandises.

À la surface des océans, ça tangue mais les calculs des ingénieurs et les fers à souder des métallos permettent à cette guerre commerciale et à ces technologies de produire les réassorts plus ou moins nécessaires à nos vies de tous les jours.

Des liens, des nouages étroits s’établissent entre société marchande globalisée, idéologie libre-échangiste et développement scientifique et technologique. Des modes de contrôle de plus en plus sophistiqués interviennent sur nos trajectoires, nos consommations, nos droits d’accès. Attirail d’ingénieurs, porte-conteneurs, théories des flux, stratégies de sous-traitance, composent parmi d’autres éléments nos réalités collectives et individuelles. Entrepôts d’Amazon, voitures Uber, sacs à dos Deliveroo, appartements Airbnb dessinent l’influence de l’organisation logistique et sa portée globale.

Qu’est-ce que ce mouvement incessant de personnes, objets et autres fabriquent comme genre de monde ?

Palette, transpalette, chariot élévateur, conteneur, code-barre, puces de traçabilité, drone, réseau de satellites, géolocalisation, modèles mathématiques, data-center, etc permettent à cette production à flux tendu d’entreposer, stocker, préparer, recevoir et distribuer les myriades d’objets qui nous entourent.

En 1956, la capacité du premier porte- conteneurs l’Idéal X était d’environ 1 000 conteneurs, puis ont suivi les « Post-Panamax », si grands qu’ils ne pouvaient plus emprunter le canal du Panama. On parle aujourd’hui de mega-ships (la capacité des navires a encore été multipliée) pouvant embarquer plus de 20 000 conteneurs.

Le déplacement des marchandises n’existe pas sans une multitude d’acteurs, travailleurs du transport, entreprises de l’économie numérique, firmes de sous-traitance, lieux de stockage, logiciels s’activent et font prospérer le commerce international. Cela se matérialise aussi par des constellations d’entrepôts qui couvrent les zones périurbaines ici et ailleurs.

Entrepôts, plateformes, hubs, centres de tri, usines à colis qui alimentent l’e- commerce et la grande distribution. Préparateurs, caristes, récepteurs de commande brassent des monuments éphémères à géométrie variable « filmant » ici pour mieux empiler là-bas.

Depuis plus de soixante-dix ans, l’expansion des routes marchandes a édifié un monde qu’il s’agit de gérer de façon la plus optimale même si cela va à contre-courant d’une planète en surchauffe.

Initialement attiré par le théâtre, Frank Micheletti décide finalement de s’orienter vers la danse, en accompagnant l’artiste et chorégraphe Josef Nadj sur plusieurs de ses créations, et sur la reprise d’anciennes pièces de son répertoire. D’autres collaborations parallèles se construisent, jusqu’à ce qu’il cofonde en 1996 la compagnie Kubilai Khan investigations. Depuis, plus de trente créations ont été représentées en France et dans plus de quatre-vingts pays.

Toujours guidé par une pensée géographique et aimanté par l’esprit des lieux, Frank Micheletti aime doubler sa recherche corporelle d’une observation aiguë des transformations en cours dans les différents types d’espaces, urbains ou naturels, en notant les continuités ou ruptures dans l’interconnexion de ces mondes. En 2009, il demeure cinq mois à Kyoto, où il est lauréat du programme de la Villa Kujoyama. Il garde depuis pour l’archipel nippon un intérêt constant et un étonnement sans cesse renouvelé.

En tant que chorégraphe, il apprécie les notions de forme et de distance, qui se complètent aux intersections entre espace, langage et corps. Il est attaché à ce goût particulier qui associe géographie des formes, poétique du mouvement et politique des présences.

De nombreuses collaborations en dehors de son domaine d’expression l’ont encouragé à des approches transversales. Avec la compagnie, il a monté plusieurs résidences, laboratoires et créations combinant le champ chorégraphique avec des chercheurs d’autres disciplines (géographes, anthropologues, romanciers ou plasticiens).

En 2018, Frank Micheletti enclenche un nouveau cycle de travaux en milieu naturel intitulé Ciel Ouvert. Dans le cadre de ces expériences en extérieur, il a réalisé deux cycles de résidences dans trois parcs naturels régionaux ; un cycle de résidence artiste-chercheur avec une anthropologue italienne et un deuxième cycle avec deux musicien.ne.s. Dans un tout autre registre, la compagnie organise à Toulon (son lieu d’implantation) le festival Constellations, un cosmos dansant et sonore qui prépare sa quatorzième édition. La ligne artistique accompagne les virages d’une création audacieuse, exigeante et ouverte au renouvellement des écritures.

Frank Micheletti cultive aussi une relation avec la musique, en passant des soirées avec ses platines vinyles sous le nom de Yaguara.