À l’heure où la parole féministe se libère, qui sont ces jeunes filles inscrites à des concours de beauté ? Pour le savoir, Suzanne de Baecque a participé à l’élection de Miss Poitou-Charentes. Un spectacle drôle et touchant.
Avec la Carte Châteauvallon-Liberté, votre 6ème place de spectacle est offerte !
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Tarif spécial à 4 € de 19h à 2h les soirs de représentation au parking Q-Park Liberté, place de la Liberté en réservant ici.
Le bar est ouvert les jours de représentation, 1h avant le début du spectacle et après la représentation. Il propose une restauration légère, avec des produits locaux et de saison.
Infiltrer le comité et partir à la rencontre de celles qui rêvent de devenir Miss. Loin des clichés, Suzanne de Baecque raconte cette expérience et explore toute son ambivalence : comment refuser d’être scrutée et jugée, tout en souhaitant plaire et être belle ?
Accompagnée de sa complice Raphaëlle Rousseau, elle partage les témoignages de concurrentes. À travers textes, vidéos et enregistrements sonores, toutes se livrent sur leur rapport au corps, sur leur sexualité, sur le regard des hommes. Autant de récits intimes qui, mis bout à bout, esquissent le portrait sensible d’une jeunesse d’aujourd’hui.
Mise en scène Suzanne de Baecque
Avec Suzanne de Baecque et Raphaëlle Rousseau en alternance avec India De Almeida
Chorégraphie Raphaëlle Rousseau
Conception lumière Thomas Cottereau
Création vidéo Manon Sabatier
Création Costumes Marie La Rocca
Composition musicale Valentin Clabault avec la voix d’Oscar Lesage
Régie lumière et générale Zélie Champeau en alternance avec Vincent Dupuy
Régie sonore Simon d’Anselme de Puisaye en alternance avec Isia Delemer
Regard extérieur India De Almeida et Stéphanie Aflalo
Administration de tournée Fatou Radix
Production CND Orléans / Centre-Val de Loire
Coproduction Le Méta – CDN Poitiers Nouvelle Aquitaine / Théâtre du Nord – CDN Lille Tourcoing
Avec le soutien du T2G – Centre Dramatique National de Gennevilliers, du fonds d’insertion de l’École du TNB et avec la participation artistique du Jeune théâtre national
Avec le dispositif d’insertion de l’ÉCOLE DU NORD, soutenu par la Région Hauts-de-France et le ministère de la Culture
Remerciements à l’ensemble de la Promotion 6 de l’Ecole du Nord
Photos © Jean-Louis Fernandez
Texte © Vanessa Asse
L’Ecole du Nord de Lille, où j’étais élève-comédienne, avait mis en place un atelier de recherche appelé « Croquis de voyage » au début de ma troisième année. Le concept de l’atelier était simple, se résumait en une ligne : pendant un mois, partir en solitaire avec son sac à dos et un projet personnel, imaginé quelque part en France. Au retour de cette immersion assez radicale, en faire naître une forme artistique. Nous étions libres d’inventer tout ce que nous voulions : écriture, théâtre, danse, vidéo ou peu importe.
A l’annonce de cet atelier je me suis questionné sur ce que je voulais faire et où je voulais partir ? La contrainte de l’exercice était aussi de partir en voyage avec notre regard de comédien et non pas de journaliste. Le défi de se mettre en scène en tant qu’acteur.rice dans notre propre aventure. J’avais l’instinct qu’il fallait que je travaille à un endroit inconfortable pour moi. Que le but de cet exercice était de me déplacer en tant qu’actrice, que j’expérimente des choses dont je ne me sentais pas capable. Un vertige s’est alors ouvert en moi et je me suis demandé, peut-être sincèrement pour la première fois, quelle actrice j’étais ? Mais surtout qu’est-ce qui me questionnait, me dérangeait et me faisait souffrir intimement dans mon métier ? Comment je voyais les autres comédiennes aussi ? Et quelles lignes je voulais essayer de faire bouger ?
Au quotidien, je suis toujours très intimidée par le regard (celui des hommes en particulier) que l’Autre peut poser sur moi. Je suis complexée par ce que je pense dégager physiquement. Et dans ma formation, je me suis toujours interdit de jouer un certain type de rôle, « la jeune première ».
Dans le théâtre classique, la jeune première ou le jeune premier est souvent le rôle principal. C’est l’« amoureuse » que le spectateur suit tout au long de la pièce. La jeune fille à laquelle on s’identifie. Quand on cherche sur Wikipédia une définition on tombe immédiatement sur celle-ci : « L’emploi d’amoureux.se exige généralement de la jeunesse, un physique agréable, une voix séduisante au débit animé, de la distinction et une capacité à exprimer toutes les facettes d’un sentiment contrarié ou partagé. »
J’ai l’impression qu’au cinéma, le fantasme de la jeune première, plus généralement de la jeune fille, est toujours omniprésent et se rattache encore plus au physique qu’au théâtre, excluant pas mal d’actrices qui n’ont pas le corps ni l’âge qui correspondent. Je ne me suis personnellement jamais reconnue dans « cette caste des jeunes premières » . En effet, la standardisation du corps des actrices et la colonisation du cinéma par l’industrie de la mode et de la publicité m’ont toujours extrêmement violentée ; cette phrase peut apparaître comme un lieu commun mais elle résonne intimement quand on le vit au quotidien en pratiquant ce métier. On s’est habitué à ces images, habitué à cette idée, avec une grande banalisation, mais cela ne les empêche pas d’exister, au contraire.
Il y a quatre ans de ça, je passais les concours des écoles nationales de théâtre. Je me souviens de cette période particulièrement angoissante faite de remises en question. Je ne cessais de me questionner sur mon désir de devenir actrice et sur ma capacité à y parvenir.
J’étais partie me reposer quelques jours chez ma mère qui vit une partie de l’année à Berthegon, dans un petit village du Poitou-Charentes. Une pause dans mon rythme de travail s’imposait. C’était une après-midi, et j’étais en train de faire les courses au Super U de Lencloître, la petite ville la plus proche J’accompagnais mon beau-père. Nous allions passer à la caisse. Pendant l’attente, nous feuilletions les magasines style Télé 7 Jours ou Télé Star. Il y avait une petite affiche, à coté des revues, où il était inscrit quelque chose comme : « Mesdemoiselles, plus que quinze jours pour déposer sa candidature pour l’élection de Miss Poitou-Charentes… ». Mon beau-père s’est alors tourné vers moi et m’a dit avec son second degré légendaire: « Ah bah tiens, si t’as pas tes concours, tu pourras t’inscrire à Miss Poitou ! ». J’en ai eu comme le souffle coupé. Ca y est, elle était là, l’actrice porte-manteau. On venait de mettre l’actrice et la Miss dans le même sac. Mais quelles étaient réellement leurs différences ? Un métier d’image, de représentation et de communication. C’était de plus une phrase méprisante pour tout le monde. Pour les actrices, qui n’ont pas toutes demandées à être des vitrines et des égéries de luxe. Pour les Miss, qui n’ont pas besoin de ce mépris de classe permanent.
Quatre ans plus tard, j’ai repensé au Super U de Lencloître. J’avais trouvé mon projet. Me présenter à l’élection de Miss Poitou-Charentes 2020. En tant qu’actrice. J’avais besoin de vivre l’expérience intimement, de me mettre en scène dans le réel. Infiltrer le comité à ma manière, sentir comment le concours transforme mon propre corps. Mais aussi partir un mois à la rencontre de mes concurrentes. Des jeunes filles de mon âge qui se présentent aux concours de beauté et dont le rêve est de devenir « miss régionale ». Comprendre ce rêve qu’elles ont toutes en commun. Comment en 2020, alors qu’une nouvelle parole féministe est en train de naître, de se libérer, peut-on avoir envie de devenir Miss ? Qu’y a-t-il derrière ces corps que l’organisation Miss France fabrique ?
C’est un spectacle qui questionne la normativité des concours de Miss et affirme avec force que les voix de ces candidates méritent d’être entendues, que leurs histoires méritent d’être racontées et dit aussi une foi très profonde dans le théâtre comme espace de liberté où l’on peut enfin peut-être se tenir debout. France Culture
Les deux comédiennes forment un duo épique et épatant. Elles s’inscrivent dans la lignée des grands acteurs du burlesque (…) à cette façon de nous faire rire aux éclats des situations les plus tristes sans jamais se moquer des protagonistes, au contraire. Marie-José Sirach, L’Humanité
Suzanne de Baecque se forme à la Classe Libre du Cours Florent où elle travaille sous la direction de Jean-Pierre Garnier, Sebastien Pouderoux (de la Comédie Française), Philippe Calvario et Carole Franck. Elle participe au Prix Olga Horstig, orchestré par le comédien David Clavel et joué au théâtre des Bouffes du Nord. Chaque séquence du spectacle est écrite par un ou une comédien.ne. Elle co-écrit et met en scène Les voix du crépuscule avec son camarade David Guez. Ils sont tous les deux lauréats du Prix Olga Horstig 2017 pour ce travail.
Puis en 2018, elle intègre la promotion 6 de l’Ecole du Nord (Direction Christophe Rauck). Durant cette formation, elle travaille à plusieurs reprises sous la direction d’Alain Françon (parrain de la promotion). Elle fait aussi la rencontre d’intervenants comme Cyril Teste, Guillaume Vincent, Frédéric Fisbach, Cecile Garcia Fogel, Jean-Pierre Garnier, André Markowicz, Pascal Kirsch ou encore Margaux Eskenazi.
À sa sortie d’école, elle joue le rôle de Lisette dans le spectacle d’Alain Françon, La Seconde surprise de l’amour de Marivaux, en novembre 2021 à l’Odéon puis en tournée. Elle remporte pour ce spectacle le Prix Jean-Jacques Lerrant de la Révélation théâtrale du Syndicat de la Critique. Elle est également nommée aux Molières 2022 pour ce rôle dans la catégorie Révélation féminine.*
En 2023, elle joue dans le spectacle de Guillaume Vincent, Vertige (2001-2021), au Théâtre des bouffes du Nord et en tournée.
À l’automne 2023, elle retrouve Alain Françon pour sa nouvelle création au Théâtre de la Porte Saint Martin, Un Chapeau de paille d’Italie d’Eugène Labiche. Feu! Chatterton signe la musique du spectacle.
Au cinéma et à la télévision, elle tourne dans plusieurs productions sous la direction de Sarah Suco (Les Eblouis), Blandine Lenoir, Nikola Lange (dans la série féministe Derby Girl), François Ozon (Mon Crime), Katell Quilivéré (Le Temps d’aimer), Maiwenn (Jeanne du Barry) ou encore Caroline Vignal (Iris et les hommes).
Tenir Debout est sa première création, portée en production par le CDN d’Orléans, et crée en septembre 2022. Le spectacle poursuit depuis sa tournée dans toute la France.